Open/Close Menu Dynamique Congolaise de Réflexion et d’Actions Innovantes

26 avril 2014, UCL

Thème :

Rencontre organisée à Bruxelles par DC-RACIN autour des élections régionales, provinciales, fédérales belges et européennes de mai 2014.

Objectif :

Une occasion d’échanger avec des candidats issus de la communauté congolaise en Belgique : Ursule Akatshi, Jean-Yves Kitantou, Mauricette Nsikungu, Lydia Mutyebele, Olivier Kayomo, Isabelle Kibassa, Mie-Jeanne Nyanga, Bertin Mampaka, Gisèle Mandaila et Marie Paule Tshombe.

Compte-rendu :

Entre 80 et 90 personnes présentes ! Débat de qualité avec des candidats très accessibles et qui ont bien joué le jeu ! Bien résumé par l’article ci-dessous.

Article : De la chance électorale à la chance politique ?

3 en 1. C’est un produit de la 6ème réforme de l’Etat. Le 25 mai prochain, tous les Belges seront convoqués aux urnes pour les élections européennes, fédérales et régionales. Plusieurs candidats, tous partis confondus, seront issus de l’Afrique subsaharienne. La bise de la diversité a également ébranlé les forteresses nationalistes de la NVA. Une première. Le parti de Bart de Wever a aligné 3 candidats immigrés d’origine congolaise. Rarement scrutin électoral n’aura autant dévoilé une Belgique cosmopolite. Reste une question lancinante. Comment ces candidats peuvent-ils convertir cette chance électorale en chance politique ?

Samedi 26 avril. Bruxelles Alma. Une conférence participative est organisée par une association congolaise bien connue avec plusieurs candidats belges de la communauté congolaise. Le choix des débattants n’est pas anodin. D’une part, un panel composé de jeunes candidats en quête de reconnaissance et un autre composé des ténors, des élus sortant habitués du jeu politique belge.

Il ne passe pas une semaine sans que ces types de rencontres soient organisés au sein de la société civile congolaise. Ce que déplore d’ailleurs Bertin Mampaka (candidat CDH) présent à l’évènement. La communauté a besoin de ces genres de rencontres en dehors des campagnes électorales dit-il lors de son discours de présentation.

Bertin Mampaka est le précurseur de la participation des candidats issus d’origine congolaise aux élections en Belgique. Il est le tout premier candidat de la communauté congolaise à se présenter aux élections de 1999 même si la visibilité politique des belges d’origine étrangère remontent au scrutin de 1994. Plusieurs candidats d’origine maghrébine sont élus en Flandre et en Wallonie lors des communales de 1994. Mais la communauté congolaise devra attendre 1999 pour avoir son tout premier candidat. Bertin Mampaka sera aussi premier échevin d’origine congolaise de la commune de Bruxelles ville, importante du fait de son activité touristique très dense.

A côté de Bertin Mampaka, il y a également une fourchette d’élus sortants qui se représentent à l’instar de Mie Jeanne Lumbala, (députée fédérale CDH), Gisèle Maindala (députée bruxelloise FDF et ancienne secrétaire d’Etat), Isabelle Kibassa (députée régionale PS dans le brabant wallon) qui, avec son lot des compétences, gère plus de 52 % du budget du Brabant Wallon, ainsi que Marie- Paule Tshombe (première conseillère communale noire à Woluwe Saint-Lambert et candidate FDF aux régionales ).

Quelques jeunes et nouveaux candidats se démarquent de la mêlée. Il s’agit notamment de Jeannot Kabuya (Spa), Mauricette Akhiet(CDH), Lydia Mutyebele (PS), François Kayomo (FDF), Laeticia Kalimbiriro (PS). Même la NVA caricaturée, à tort ou à raison, d’anti-immigration se prête au jeu. Ils sont 3 aujourd’hui à se présenter sous l’étiquette du parti nationaliste flamand. Parmi eux, Seva Ndibeshe, un ancien MR qui justifie son choix par une envie d’agir, de faire quelque chose. J’étais un membre très actif du MR. J’avais écrit au parti pour demander un engagement un peu plus actif, les instances du parti ne m’ont jamais répondu. Cette opportunité, la NVA me l’a donnée. Elle m’a permis de mettre en avant mes idées. Mais pour beaucoup, les candidats subsahariens engagés dans la NVA sont des brebis égarées qui y vont par amateurisme.

Dans les hautes sphères politiciennes, il se chuchote une « multiculturalisation » de la politique belge. Quoi qu’il en soit, cette diversité des candidats sur les listes électorales est révélatrice de deux réalités : l’ouverture de l’arène politique belge aux candidats immigrés et le vote préférentiel ethnique est indéniablement courtisé par tous.

Des élus de seconde zone

N’empêche. Les candidats d’origine subsaharienne doivent apprendre l’art de gouverner. Car il ne suffit pas de se faire élire, encore faut-il pérenniser cette victoire électorale après les échéances électorales d’aprèsYves Lodonou, responsable de l’émission politique sous l’arbre à palabre sur radiocampus.

Ce qui conduit une certaine opinion à considérer ces candidats comme étant simplement des attrapes-voix relégués en « seconde zone » à la fin du cycle électoral. Ce dont est persuadé Momi M’Buze membre actif au sein de la diaspora congolaise. Il s’interroge sur le rôle des certains candidats : suppléants… « A quoi çà sert de s’afficher comme candidat de la communauté en étant 9ème ou 12ème suppléants sur la liste? Ça ne sert à rien. Sinon rapporter des voix aux têtes de liste et aux partis. Point! C’est Tout! »

Les électeurs savent pertinemment que les candidats ne sont pas porteurs des programmes personnels mais ceux de leurs partis politiques. Ils sont en effet appelés à assumer les tendances du parti pour lequel ils ont été élus. Des lors, la plus grande aspiration des niches électorales est de voir les futurs élus peser réellement dans l’appareil du parti afin d’inverser la vapeur en matière de discrimination sociale. « La communauté veut des élus qui seront à l’écoute des revendications de la communauté et qui feront en sorte que les problématiques liées à notre peuple ici en Belgique et au pays soient prises en compte, que les discours et les actions des politiciens belgo-belges puissent en tenir compte » précise Momi M’buze.

Yves Lodonou est beaucoup plus sévère, les candidats d’origine étrangère n’ont pas foi au chapitre. Ils se soumettent au didact des partis dans lesquels ils sont au risque de se voir éjectés. Ils doivent peser valablement surtout s’ils savent qu’ils ont les compétences pour le faire.  Il faut dépassionner le débat à ses yeux en ce sens qu’une question sur les sans-papiers posée par un élu immigré doit être abordée de la même manière qu’une question ayant trait à l’homosexualité explique t-il. Mais certains candidats socialistes soulignent le fait qu’ils sont préalablement consultés lorsqu’un officiel doit se rendre au Congo. Un simple avis non conforme mais une avancée certes.

Si l’on croise le nombre d’électeurs potentiels au nombre d’élus (60.000 congolais et plus de 20.000 naturalisés belges contre cinq élus), il en résulte tout de même une sous-représentation de la communauté congolaise dans le paysage politique belge. Il est donc difficile pour les candidats d’origine étrangère de s’imposer dans l’appareil du parti même si une consécration par les électeurs attribue uniquement un poids individuel, insuffisant pour pouvoir inverser le rapport de force. C’est la logique interne de l’appareil qui prime, le pouvoir dans un parti politique découle bien souvent de la capacité de raccorder le soutien des membres de la section locale à un succès électoral.

« Bâ à côté de moi mais pas devant moi »

« En étant congolais à Bruxelles, j’aimerais bien avoir Ba à côté de moi mais pas devant moi. Si je vais bien à Paris, je serais derrière Rama Yade, de même que si je vais en Angleterre je serais bien derrière un certain Koffi, au Portugal derrière un certain Bixente Dos Santos ». Par ces paroles, Bertin Mampaka étale les deux grandes tendances qui caractérisent la diaspora africaine en Belgique.

La communauté congolaise du fait de son histoire coloniale avec la Belgique se considère comme étant prioritaire sur toutes les autres. Ce que fustige le Togolais Lodounou. Aujourd’hui ce sont les grands ensembles qui permettent d’aller de l’avant. Il faut se fédérer, dit-il.

Les africains qui siègent au niveau fédéral, régional ou communal doivent, pour certains projets, travailler à l’unisson et non agir de manière dispersée. Une chose est certaine. Cette division retarde la concrétisation d’un projet que la société civile panafricaine réclame depuis belle lurette et qui serait un point de repère pour l’Afrique : le fameux centre culturel africain. Et non un centre culturel congolais insiste notre observateur togolais.

Incidence des affaires intérieures congolaises

Il est connu que l’électorat d’origine étrangère vote plus à gauche. Et l’enjeu communautaire/ethnique est une des tactiques entretenues par les partis politiques eux-mêmes. D’après Fatima Zibouh, chercheuse interrogée par l’institut Pax Christi, le PS cible plus particulièrement les Marocains, le CDH les électeurs d’origine sud-saharienne, le parti Ecolo les latino-américains. La chercheuse défend qu’il s’agit moins d’une « ethnicisation » des cibles que d’une stratégie politique bien comprise en fonction des origines socio-économiques des électeurs (Marocains), de leur affinité avec des valeurs chrétiennes éventuellement relayées par des églises locales (Afrique sub-saharienne).

Cependant, l’ethnicité électorale a pour conséquence inquiétante de déplacer les enjeux du scrutin pour des causes congolaises. C’est le cas par exemple, d’une campagne de diabolisation menée par des opposants congolais refugiés en Belgique qui appellent au boycott des partis francophones accusés d’être de mèche avec le régime de Joseph Kabila.

Des accusations qui ont exacerbé Bertin Mampaka et de Gisèle Maindela. Pour l’élu et sénateur sortant, l’explication se résume en deux arguments : soit on est inculte et donc pas cultivé soit on est ignorant et nous avons alors le devoir d’informer.

Pour Gisèle Maindela les citoyens belges d’origine congolaise doivent être intelligents dans la manière d’agir. Elle rappelle que l’avenir du Congo ne peut pas être décidé en Belgique et qu’il appartient aux Congolais de prendre leur destin en main.

Il y a indéniablement une évolution quantitative du nombre des candidats d’origine subsaharienne et particulièrement d’origine congolaise. Peut-on, dès lors, évoquer une évolution qualitative avec des députés qui vont au-delà de la simple notion d’attrapes-voix ? Il revient aussi à l’électorat de réfléchir sur les différentes stratégies à adopter afin de renforcer le poids politique de ses élus.

Les candidats et les électeurs doivent comprendre que les élections sont un enjeu collectif. Ce qui pousse à nous questionner sur l’existence d’une communauté subsaharienne, homogène, structurée et organisée à l’instar des communautés maghrébines ou turques qui s’accommodent afin de pourvoir s’offrir des élus. Et de ce point de vue, seul le panafricanisme apportera des résultats probants.

Cynthia Bashizi Journaliste Team DC RACIN

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